Puis-je faire un emprunt immobilier en CDD ?

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L’accès au crédit immobilier en France reste encore largement conditionné par la stabilité professionnelle des emprunteurs. Dans cet univers où le contrat à durée indéterminée (CDI) règne en maître, les détenteurs d’un contrat à durée déterminée (CDD) peuvent se sentir à l’écart. Pourtant, faire un emprunt immobilier en étant en CDD n’est pas un rêve inaccessible. Si les banques affichent une certaine frilosité, elles commencent progressivement à s’adapter aux mutations du marché du travail. À condition de bien structurer son dossier, de faire preuve de rigueur et, dans certains cas, de se faire accompagner, le projet immobilier reste tout à fait envisageable.

Un marché du crédit encore rigide face aux parcours professionnels atypiques

Le CDI : une référence sécurisante pour les banques

Les banques françaises évaluent les demandes de crédit en fonction du risque, et le type de contrat de travail est l’un des premiers critères examinés. Le CDI est encore perçu comme le Graal : il garantit des revenus réguliers et continus sur la durée du prêt, souvent comprise entre 20 et 25 ans. C’est un gage de sécurité pour les établissements prêteurs.

En revanche, un contrat à durée déterminée, par sa nature temporaire, soulève immédiatement une interrogation : que se passe-t-il lorsque ce contrat arrivera à son terme ? L’incertitude entourant l’avenir professionnel du demandeur est perçue comme un risque majeur de défaut de paiement.

Une vision dépassée du monde du travail

Pourtant, cette préférence pour le CDI est en décalage avec la réalité. En France, près de 86 % des embauches se font aujourd’hui en CDD. Même si ces contrats sont souvent de courte durée, leur généralisation remet en cause la pertinence du CDI comme unique référence de stabilité.

Les parcours professionnels sont désormais marqués par une plus grande flexibilité : missions intérimaires, auto-entrepreneuriat, indépendance, intermittence… Ces formes d’emploi, longtemps marginales, deviennent la norme dans plusieurs secteurs. Le crédit immobilier doit donc s’adapter à cette diversité.

Oui, emprunter en CDD est possible

Des exemples concrets à l’appui

De nombreux témoignages montrent que, malgré les refus initiaux, des emprunteurs en CDD parviennent à obtenir leur financement. Par exemple, un couple où seule la conjointe est en CDI, et l’autre en CDD, a pu acheter une maison après plusieurs rejets, en passant par un courtier qui a su valoriser les éléments solides de leur dossier.

Cela prouve qu’il ne faut pas baisser les bras face à un premier refus : une bonne stratégie et les bons interlocuteurs peuvent tout changer.

Les conditions pour convaincre les banques

L’analyse “à l’instant T”

Les banques analysent la situation du demandeur au moment de la demande, sans forcément se projeter dans l’avenir. C’est ce qu’on appelle la “radiographie à l’instant T” : niveau de revenus, statut professionnel, ancienneté, situation familiale, dettes, gestion bancaire… Tous ces éléments sont scrutés avec attention.

Un CDD peut être jugé acceptable si le reste du dossier est solide. Voici les leviers qui peuvent rassurer les établissement prêteurs : 

  • Une ancienneté importante dans le poste, même en CDD.
  • Un CDD renouvelé plusieurs fois ou inscrit dans un secteur en tension.
  • Un co-emprunteur en CDI, qui stabilise le foyer.
  • Un apport personnel conséquent (idéalement 10 à 20 % du prix du bien, voire plus).
  • Une gestion bancaire exemplaire : pas de découvert, pas de crédits à la consommation, épargne régulière.
  • Un loyer actuel équivalent aux futures mensualités, preuve de capacité à assumer la charge.

Les exceptions et profils “atypiques” recevables

Fonction publique, intérim, intermittents : des cas tolérés

Certains profils en CDD peuvent bénéficier d’une attention particulière. C’est le cas des CDD dans la fonction publique, perçus comme plus stables. Si le demandeur peut justifier de 2 à 3 ans d’ancienneté dans une administration, la banque pourra être plus souple.

Les intérimaires ou intermittents du spectable peuvent aussi faire valoir une stabilité malgré leur statut. Présenter plusieurs années d’activité sans interruption avec des revenus constants peut suffire, à condition de documenter rigoureusement son parcours (attestations d’intérim, relevés d’activité, bilans comptables…).

Le rôle stratégique du courtier

Dans les cas sensibles, faire appel à un courtier immobilier peut être déterminant. Ce professionnel connaît les pratiques des différentes banques et sait orienter les emprunteurs vers les établissements les plus ouverts aux profils atypiques.

Le courtier aide aussi à structurer le dossier, à le présenter de manière rassurante, et à négocier les conditions du prêt : taux, durée, assurance… Dans certains cas, son intervention permet même de débloquer des situations bloquées depuis des mois.

Les garanties supplémentaires pour sécuriser le dossier

Caution, apport, PEL : des atouts à valoriser

Lorsqu’un profil est jugé instable, des garanties externes peuvent être ajoutées pour rassurer la banque : 

  • La caution d’un tiers : un proche s’engage à rembourser en cas de défaillance.
  • Le Crédit Logement : un organisme qui se porte garant moyennant une commission.
  • Un PEL bien alimenté : preuve d’une volonté d’épargne et d’un projet préparé.
  • Un héritage ou une donation en guise d’apport.

Cas particulier : l’investissement via des montages juridiques

Un autre levier, surtout pour les auto-entrepreneurs ou freelances, est la structuration du projet immobilier via une SCI ou une SARL. En structurant juridiquement son activité et en créant une société civile immobilière (SCI), un emprunteur peut rassurer les banques grâce à une gestion professionnelle et une vision patrimoniale à long terme.

Des exemples concrets montrent qu’avec un montage bien conçu, un différé de crédit et une bonne rentabilité locative, des projets peuvent être financés malgré une situation professionnelle jugée fragile.

Anticiper pour mieux convaincre

Avant même de chercher un bien, il est recommandé de : 

  • Évaluer sa capacité d’emprunt avec un professionnel.
  • Constituer une épargne de sécurité.
  • Préparer tous les justificatifs : bulletins de salaire, contrats, relevés bancaires, attestation d’emploi, etc.
  • Être transparent avec le vendeur sur l’avancement du dossier de prêt.

Un vendeur bien informé peut accorder un délai supplémentaire pour finaliser le financement, surtout si le projet est sérieux.

Vers une évolution des pratiques bancaires ?

Un marché en lente mutation

Face à la transformation du marché de l’emploi, certaines banques commencent à assouplir leurs critères. Des offres spécifiques émergent pour les indépendants, les freelances ou les salariés en CDD récurrents. Toutefois, cette évolution est lente et reste marginale.

Le rôle de la technologie et de la réglementation

Les fintechs et algorithmes de scoring peuvent apporter une nouvelle objectivité dans l’évaluation des dossiers, en intégrant des critères comme la gestion financière ou la régularité des revenus, plutôt que le seul type de contrat.

Le Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) fixe des normes strictes (33 % de taux d’endettement maximum, durée maximal de 25 ans…), mais laisse une marge de manœuvre. Il n’exclut pas, à terme, une meilleure prise en compte des parcours atypiques.

Faire un emprunt immobilier en CDD n’est pas une mission impossible, mais cela nécessite plus de rigueur, de préparation et souvent un accompagnement sur-mesure. Un bon dossier, bien présenté, peut faire oublier l’absence de CDI/

Avec les bons outils, un apport, une bonne gestion, un co-emprunteur, ou un montage juridique bien pensé, même un profil jugé “précaire” peut se transformer en investisseur fiable. Le monde bancaire évolue, et l’accès à la propriété s’ouvre peu à peu à des réalités professionnelles plus diverses.

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